Une histoire de mirwart

Survol des origines à nos jours

Motte castraleMirwart, Mirvold, Mirenwalt, un nom obscur : en vieil allemand, marais & forêt / moer & wald ?

En tout cas, il y eut une forteresse, plantée là peu avant l’an mille, sur son éperon (‘en surplomb de vallée ou de marais’ ?), initialement construite en bois puis progressivement en pierre, jusqu’à se retrouver avec basse-cour et logis cerclés de murailles et de tours.

On voit là l’intérêt de l’abbaye hubertine à la recherche d’une protection militaire tout en la redoutant et celui de féodaux qui souhaitent contrôler une entrée de Bouillon et le croisement de grands chemins, l’un descendant de Liège à Bouillon (par Rochefort, Grupont, ‘La Justice Au Cheval Dos’, Mirwart et Transinne), l’autre reliant l’est à l’ouest, Saint-Hubert à Givet (par le moulin, ‘les Revaus’ et Wellin).

Caillou d’achoppement ou monnaie d’échange pour princes et mitrés : bien du duc de Lotharingie Godefroid le Barbu, le château est détruit par Henri le Noir en 1047, passe à Richilde comtesse de Hainaut puis à l’évêque de Liège Henri de Verdun qui le fait reconstruire en 1077. Rasé par l’abbé Thierry en 1083, reconstruit par l’évêque de Liège Otbert en 1099, etc., etc. Charles le Téméraire le fait saisir et l’offre à Evrard IV de la Marck en 1471 pour services rendus au sac de Liège.

À son apogée, la Terre de Mirwart comprend quelque vingt-deux villages et hameaux, depuis Lomprez et Wellin (partagé avec Stavelot), Martouzin et Froidfontaine à l’ouest jusqu’à Awenne, Smuid, et Libin à l’est.

Les XVI et XVIIe siècles, la période espagnole, les Arenberg

Margherite de la MarckVers 1547, la seigneurie se retrouve aux mains de Marguerite de la Marck (1527-1599), comtesse puis princesse d’Arenberg, voyageuse, cultivée et très active, notamment dans des aménagements à Mirwart.

Elle rachète toutes les parcelles du flanc nord de la colline, versant droit de la Lomme, pour s’y réserver un jardin potager et un vaste parc, figeant ainsi la configuration du village.

Voici, pour un siècle et demi, la seigneurie aux mains des Arenberg dont les résidences restent à Enghien et Bruxelles.

Un intendant y est nommé et rétribué, logé au château, receveur des droits seigneuriaux et capitaine de manants susceptibles d’être réquisitionnés.

Deux Hofsmit, père et fils, y déroulent deux longues carrières (1629-1655-1692) ; devenue Hoffschmidt, la famille quittera la Lomme pour la Lesse et les hauts de Bastogne.

Témoins de la puissance seigneuriale : à Mirwart, la grande ferme (toujours là) à portée du château et le pilori au centre du village ; à Villance, une maison forte.

Dans chaque mairie, le moulin banal qui impose son monopole et une cour constituée d’un mayeur et d’échevins, d’un greffier et d’un sergent, tous nommés, assurant la police ainsi que des fonctions administratives et judiciaires, y compris la condamnation à mort.

Pour toute la Terre, quatre forestiers ; à ses entrées routières, des gibets à trois poteaux, comme à Marsolle.

Carte de Mirwart  Carte de Mirwart

Le seigneur de Mirwart étant voué (protecteur militaire) de l’abbaye comme de Nassogne, le personnel mirwartois surveille les marchés à Saint-Hubert et, lorsque la Terre hubertine poursuit la sorcellerie au début du XVIIe siècle, il assure les emprisonnements au château et les exécutions par bûcher sur les hauts de Grupont (lieu-dit à l’Justice vers Bel’Air) et de Lorcy.

Statue de saint Rock dans l'église de MirwartLe creux du XVIIe siècle est calamiteux pour Mirwart et toute la seigneurie.

Une épidémie de peste ravage la région en 1636 ; à Mirwart même, malgré la résistance du curé de Bure et de l’abbé de Saint-Hubert, le maître des forges Jean del Hamaide fait élever une chapelle auprès de la fosse commune, sur le haut du village. Le village sera dès lors voué à saint Roch (voir à l’église, l’hommage d’un autel latéral).

Les guerres, indéfiniment reconduites entre l’Espagne et la France, pèsent très lourdement sur les habitants par les réquisitions d’hommes valides, par les hébergements de troupes, sous les raids et les razzias à la frontière.

Vidée par des émigrations, une seigneurie de quelque huit cents ménages en 1624 n’en comptait plus guère que cent à cent cinquante en 1659.
En restait-il plus d’une dizaine à Mirwart même.

Peinture de Breughel - détailLa paix revenue, la population peut se reconstituer.

Mais les forges (un fourneau dans le haut du Marsoul et une forge d’affinage avec son maka, le lourd marteau, sur le bief en contrebas du moulin) qui auront vécu près de deux siècles, ne peuvent résister à la concurrence qui prospère dans les bassins lorrains et liégeois.

Site de Marsolle actuelReconstitution du site de Marsolle

Pierre tombale de Godefroid Ferdinand de SamckersLe XVIIIe siècle, les de Smackers

Les Arenberg se défont de cette seigneurie affaiblie : enrichi par le fermage des domaines royaux du Limbourg et portant bientôt la particule, Godefroid-Ferdinand Smackers la leur rachète, rase l’austère forteresse ébranlée par des incendies, fait élever la demeure classique que nous connaissons (le ‘1710’ fiché sur la façade), y réside, et meurt en 1725.(la belle pierre tombale scellée aujourd’hui dans le porche de l’église).

Voilà Mirwart aux de Smackers jusqu’à la fin du siècle.

Et depuis le XIXe siècle

Girouette avec les armoiries d'Artigues de Vonêche

Le domaine passe successivement en 1820 à M. d’Artigues de Vonêche puis à la Société forestière et agricole, en 1843 à la baronne Léon van der Linden d’Hooghvorst,en 1857 à Jules-Pierre-André Darrigade (à qui les paratonnerres des tours doivent leur couronne comtale) et en 1891 à Max von der Becke, armateur anversois et amateur de forêt ardennaise.

Dans la neuve Belgique, les destins du domaine et du village divergent progressivement : Mirwart se retrouve pour un temps en entité annexe de la commune d’Awenne avant d’acquérir son autonomie et de disposer de très enviables lots de forêt… que ne bouda pas Saint-Hubert lors de la fusion des communes.

Une première église fut remplacée par une seconde, l’actuelle, mieux en mesure d’accueillir une population nombreuse et très majoritairement catholique.

Le 20 octobre 1858, événement du siècle : tout le village (370 habitants) descend au Block fêter le passage du premier train. Bientôt le chemin de fer offre quelques emplois : entretien de la voie, gestion manuelle au Block des feux et de la barrière, réparation dans les ateliers de Jemelle. Et introduit une nouvelle nuance dans la palette politique du village.

À l’exception de la grande ferme dotée exceptionnellement de 80 hectares, bien des ménages tentent de survivre avec de petites exploitations agricoles : les prairies en vallée sont profondes mais les cultures se trouvent bien à l’écart à Cheval-Dot, sur un sol froid et schisteux moins donnant que le calcaire famennois.

Plusieurs maisons ont gardé leurs trois entrées : pour les gens, pour les vaches et le cheval, pour la charrette à foin. Quand vient un peu d’aisance, on reconstruit la façade en pierre (grès local ou même calcaire de Calestienne) en la rehaussant, mais sans toucher aux colombages mitoyens ; et l’ardoise ardennaise remplace le chaume.

Maisons typiques du village.

En 1930, le village fête le Centenaire, les filles en infirmières, images de la souveraine – l’une, grimée en noir, évoquant la colonie – les garçons fringués à la Charlier-jambe-de-bois.

Et l’on plante les deux tilleuls devant l’église.

Mirwart connait l’exode de 40, la guerre (l’hébergement de juifs au presbytère) et, à l’offensive von Rundstedt, la réquisition des pièces de séjour, le froid, les Panzer répliquant aux Anglais qui canonnent depuis Tellin. Souvenir d’un enfant de choeur : un Allemand à genoux devant la crèche !

Le cimetière a son enclos d’hommage.

Fête du centenaire 1830 - 1930

 

Louis Culot instituteurEn 1947, Maria Zeler (née à Bastogne en 1889) qui avait succédé aux religieuses à l’école des filles, prend sa retraite après 34 ans de fonction. Louis Culot (1902-1978) sera le dernier instituteur (1930 à 1976) il va regrouper les deux classes : 26 élèves dont quelques citadins venus se remplumer.

Exode rural : ils étaient 56 en 1925 ! En juin 1976, Fernand van den Abeele ferme l’école et confie les six derniers élèves à celle d’Awenne.

Image du château de Mirwart rénovéDernière famille de châtelains, les von der Beck ont vendu en 1951 le domaine à la Province de Luxembourg qui en apprécie les bois (treize cents hectares, rapidement valorisés), mais ne sait que faire de la vaste et inconfortable bâtisse.

Elle en entame tardivement un remaniement désastreux, qui ne la préserve pas d’un déplorable vandalisme et trouve enfin l’amateur enthousiaste en mesure de lui offrir une prestigieuse renaissance.

Et le château requinqué accueillera bientôt des citadins, forcément fatigués, chercher air sans carbone, volupté et romantique frisson de bout du monde.

Le site internet du château de Mirwart

Etang de mirwart à la pisciculturePar ailleurs, la Province offre dans le grand-jardin un hébergement de qualité à des activités sportives et sociales, réorganise la pisciculture, accueille par centaines scouts et patros. Y a-t-il un Belge qui n’ait ses souvenirs de camp dans la vallée ?

Un village en clairière… Le tourisme qui avait, au lendemain de la guerre, amené au Beau Site quelques industriels verviétois pêcheurs de truites, voit bientôt arriver au village les berlines et, soigneusement chaussés, les randonneurs avertis ou curieux.

On voit se convertir en gîtes plaisants des bâtisses désertées. Le résidentiel se modifie au fil de l’exode, se ‘modernise’. Il s’étend même, où il le peut, donc vers l’est, le long de la route et à l’entrée du bois, en chalets ou en villas quatre façades, à la demande d’amateurs de village… authentique.

Et de forêt… profonde. Village à école évanouie, à église quasi délaissée, à administration décentralisée, Mirwart veille paisiblement sur sa population résolument diversifiée et quelque peu rassise.

Mais, inspiré par Marie Gobaye la fougueuse et troublante cavale, il accueille dans sa pimpante École des filles des habitants fiers de leur beau village (le plus beau !), à la convivialité chaleureuse et aux projets arrosés et enthousiastes.

La poursuite de la sorcière Marie Gobaille

Nous remerions chaleureusement Jean-Marie Culot & Jean-Pol Weber qui ont rédigé le texte et grandement aidé à la réalisation de ce survol de Mirwart de ses origines à nos jours .

Pour aller plus loin, vous trouverez dans la page "Biblio" toute une série d'ouvrages sur l'histoire de Mirwart.

Les Reflets de Mirwart

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